Il faut parfois une carrière entière pour se rendre compte que
des sociétés d'une certaine taille ne supportent pas la
créativité. J'ai eu la chance de m'en rendre compte alors que
j'étais encore assez jeune. C'est pourquoi je ne travaillerai plus
jamais pour une société. Je dirigerai toujours ma propre affaire.
Bon, maintenant, cela semble en contradiction avec le fait que je
donne des conseils sur la recherche d'emploi et le recrutement. Mais
pensez bien qu'il faut un certain type de personnalité et de
motivation pour diriger sa propre affaire et un autre état d'esprit
pour travailler pour une société. C'est une question de
préférences et de dispositions. Une des raisons principales pour
lesquelles je ne travaillerai jamais pour quelqu'un d'autre que moi
même est que je me régale à être créatif et arriver à des
résultats. J'ai horreur d'obéir à des règlements et je ne
supporte pas d'être tenu à l'écart ou rejeté. Il me paraît
important d'accepter de prendre des risques et je ne laisserai
jamais une société restreindre mes choix parce qu'elle refusera de
prendre les mêmes risques.
Cela dit, revenons à votre question. Pourquoi des sociétés
paient elles cher des gens de l'extérieur pour des exercices de
créativité destinés à briser les règles mais refusent elles cet
exercice à leurs propres collaborateurs ? Je pense que c'est parce
qu'on n'a pas besoin d'exercer d'autorité sur les consultants et
autres gens de l'extérieur : on les paie et on s'en sépare dès
que la société a obtenu ce qu'elle souhaitait.
Il n'en est pas de même pour les collaborateurs. Ils doivent
être reconnus, entourés, promus et doivent recevoir des
responsabilités (et des émoluments) pour continuer à produire de
brillantes idées et un travail en conséquence. (Sinon, ils s'en
vont). Les grands groupes ne savent pas bien gérer ces individus
créatifs. Les êtres créatifs sont des trouble fêtes. Il faut
changer le système pour l'adapter à leurs nouvelles idées. Ils
attendent que les stratégies d'entreprise évoluent au gré de leur
créativité. Les sociétés ne fonctionnent pas comme cela. Elles
n'aiment pas les chiens fous (quelle que soit leur créativité).
Elles aiment les "employés fidèles et respectueux".
Elles apprécient les travailleurs normaux qui ne font pas de
vagues.
Les êtres créatifs vivent à la marge, ils sont
"différents". Les grands groupes fonctionnent au mieux à
l'intérieur de la grosse bosse de la courbe de productivité : ils
prospèrent sur les médiocres, sur ce qui est "bien assez bon
comme ça ". Les meilleures sociétés sont médiocres mais
elles le sont avec beaucoup d'efficacité. Il n'y a pas besoin de
faire beaucoup d'efforts pour fournir un produit ou un service
médiocres et en tirer beaucoup d'argent. Il vous suffit de brider
les gens créatifs, comme ça, les veaux (je parle des veaux dans
mon livre : ils constituent 80% de ceux qui se laissent facilement
diriger par leurs chefs) peuvent tranquillement continuer à téter
leur lait à la mamelle de la société. C'est ainsi que les
sociétés gagnent de l'argent.
Ne devenez pas cynique du fait de votre expérience. Vous en avez
tellement appris et vous avez aussi créé beaucoup. Vous êtes peut
être proche de la retraite, mais à mon avis, cela signifie que
vous pouvez prendre plus de liberté et faire ce que vous souhaitez.
Vous pouvez devenir un consultant de haute volée un consultant
créatif de haute volée. Vous pouvez également enseigner aux
autres, si vous prenez le temps de reformuler ce que vous avez
appris pour en faire le sujet d'un cours. En d'autres termes, de
nouvelles carrières vous attendent, si vous le souhaitez.
Un de mes patrons, un homme remarquable, m'a prévenu que
j'aurais plusieurs carrières au cours de ma vie. Quelle
extraordinaire incitation à voler de ses propres ailes. J'ai
profité du conseil tout au long de ma vie. Je ne pense pas que
votre carrière soit terminée, laissez la commencer. Je vous
souhaite plein succès et vous encourage à vous lancer.
Bien à vous,
Nick Corcodilos
Ask The Headhunter
Nick CORCODILOS est un chasseur de têtes reconnu à l'échelle
des Etats-Unis, conférencier, et fait autorité dans le domaine de
l'approche directe, du recrutement et du succès professionnel. Nick
a débuté sa carrière en 1979 dans la Silicon Valley et a été
cité dans le WALL STREET JOURNAL, le NEW YORK TIMES, FAST COMPANY,
ainsi que CNN, CNBC et MSNBC. Il a écrit : Ask
The Headhunter: Reinventing the Interview to Win the Job
(Penguin/Plume, 1997).
Traducion par M. G. Fenyö.
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